Tribune sur la Catalogne


Défendre le droit à l’autodétermination, 
mener une politique d’indépendance de classe 
pour que notre camp dispute la direction du processus

« Pour autant que la bourgeoisie d’une nation opprimée lutte contre la nation qui opprime, nous sommes toujours pour, en tout état de cause et plus résolument que quiconque, car nous sommes l’ennemi le plus hardi et le plus conséquent de l’oppression. Pour autant que la bourgeoisie de la nation opprimée est pour son propre nationalisme bourgeois, nous sommes contre. Lutte contre les privilèges et les violences de la nation qui opprime ; aucune tolérance pour la recherche de privilège de la part de la nation opprimée ».  
Lénine, Du droit des nations à disposer d’elles-mêmes

À moins de ne pas avoir vu l’ampleur du soutien au référendum du 1er octobre en Catalogne, personne ne peut nier l’existence du peuple catalan et sa volonté d’indépendance. Nous ne pouvons détourner la tête, lorsqu’on matraque des hommes et des femmes qui veulent pouvoir décider. Nous défendons bien sûr de manière inconditionnelle ce droit démocratique : « cette liberté de séparation ».

Mais défendre inconditionnellement ce droit implique tout autant de défendre inconditionnellement une politique d’indépendance de classe. C’est d’autant plus important qu’en Catalogne le processus est dirigé par une frange de la bourgeoisie et de la petite-bourgeoisie. Pour autant, il serait erroné de nier son caractère populaire et de classe : 80 % de la population de Catalogne est pour le droit de décider. Lorsqu’on atteint ces proportions, il est difficile de dire que la classe ouvrière est en dehors du processus. Quoi qu’il en soit, il y a des manifestations de soutien très claires du mouvement ouvrier : les dockers de Barcelone se sont opposés à l’arrivée de la Guardia Civil dans le port de Barcelone. Des centaines d’enseignants ont occupé leurs établissements afin d’accueillir les bureaux de vote pour la consultation sur l’indépendance. Les travailleurs de la chaîne catalane TV3 ont battu en brèche, par leurs mobilisations, l’application de l’article 155 qui impliquait la mise sous tutelle de leurs conseils de rédaction à Madrid. Sans oublier les tentatives de grève générale des 3 octobre et 8 novembre.

Une politique d’indépendance de classe : voilà notre boussole. Mais ce n’est pas ce qu’ont défendu nos porte-parole [du NPA] et encore moins Anticapitalistas. Sans que ce soit tranché au comité exécutif du parti, trois de nos porte-parole ont signé une tribune sur Mediapart qui, en plus de surestimer la situation en parlant de « révolution démocratique » et d’« ouverture de processus constituants sur la base de l’action des peuples dans tout l’État espagnol », ne marque pas la moindre distance vis-à-vis du gouvernement catalan qui n’est pas en reste dans les politiques d’austérité. Pour Anticapitalistas, sa politique ne cesse d’osciller entre différents écueils, en commençant par une politique qui ne se différencie pas de la bourgeoisie qui dirige le processus, pour finir par voter le 21 décembre prochain pour « Catalunya en comu » regroupement de « Podem » et de la maire de Barcelone qui défend un droit à l’autodétermination virtuel car devant être négocié et acté, selon eux, avec Madrid. 

Pourtant avec leurs députés, ces camarades ont les moyens de s’adresser largement autour d’eux pour que la lutte pour l’émancipation nationale renforce la lutte pour l’émancipation sociale. Ils pourraient donner un contenu de classe à la revendication de république catalane, dans le sens d’un gouvernement des travailleurs. Par exemple, une mesure comme la réquisition des banques sous contrôle du monde du travail pourrait être reprise, et cela d’autant plus que les sièges sociaux des principales banques catalanes sont partis pour Madrid. Proposer l’application de ces mesures pour l’ensemble de l’État espagnol, favoriser toutes les formes d’auto-activité et défendre les moyens d’imposer ces mesures par la grève générale : voilà une politique qui s’émanciperait de la bourgeoisie catalane et de Madrid et qui pourrait unifier notre classe. 

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